Après le droit à la paresse contre la réforme des retraites, voici le droit au chèque Nutella pour préserver sa consommation

Inflation oblige, tout le monde grogne contre le gouvernement. Très bien, mais si on laissait au consommateur le droit de donner son avis entre ce qu’il a envie et ce qu’il peut acheter? La concurrence existe encore dans ce pays.
La liberté du consommateur
Ce jour-là, j’ai compris que la fronde populaire encouragée par des responsables politiques et par quelques médias revendiquait pour tous, un droit absolu à consommer du Nutella alors que la célèbre pâte à tartiner était devenue inabordable.
En suggérant que le consommateur n’était pas obligé de consommer de la pâte à tartiner, je me suis attiré les foudres de la doxa … que n’ai-je entendu sur les réseaux sociaux, que n’avais-je pas dit d’incongru aux oreilles sensibles des clients de Lidl ou de Leclerc? Ça se passait sur CNews, dans la fièvre d’un débat chez Jean Marc Morandini sur l’inflation, fin de semaine dernière.
Je n’avais pourtant rien dit d’autre que de rappeler qu’un client est libre de ses actes d’achats. De ses choix. Qu’il existe même des organisations qui l’aident en l’éclairant sur ses choix : 60 Millions de consommateurs ou que choisir .. ça existe encore !
A l’époque du lancement des Restos du cœur, Coluche, qui avait pressenti cette immaturité disait : « donnez-moi la liste de vos besoins, je vous dirai ce dont vous pouvez vous passez. »
Parce que revendiquer un droit au Nutella quelles que soient les conditions de prix, c’est méconnaitre l’essentiel des mécanismes économiques.
Après la France confinée, la France affamée
Le débat sur l’inflation et le pouvoir d’achat tourne donc au grand déballage démagogique. Tout le monde s’en mêle en décrivant une France affamée incapable de vivre correctement tant les prix ont augmenté et de convoquer le gouvernement pour qu’il signe quelques chèques « inflation alimentaire ». Après les aides Covid, les PGE, les chèques carburant, les blocages de prix sur l’électricité, les aides au chômage et à la mobilité.
Tout se passe comme si le consommateur était piégé par la hausse des prix, sans pouvoir réagir autrement qu’en accusant le ministre de l’économie d’avoir organisé ce mois de mars rouge.
L’inflation provoque des négociations difficiles entre tous les acteurs de la chaine de valeur. Mais inflation ou pas, ces négociations ont toujours été difficiles, c’est le jeu normal de la concurrence.
L’inflation aiguise les revendications pour des revalorisations de salaires entre salariés et chefs d’entreprise. Évidemment, c’est le jeu normal de la concurrence de marché qui fonctionne y compris sur l’emploi, et surtout quand la situation est tendue, ce qui est le cas.
La concurrence toujours reine
Ce type de débat existe et domine tous les liens de l’activité économique. Heureusement. Chacun essaie d’optimiser son intérêt et a priori, l’Etat n’est là que pour vérifier le respect des règles et des pratiques.Pas plus.
Toutes les expériences de blocage des prix ou de fixation par l’Etat des tarifs ont échoué. Le symbole le plus fort étant la fixation du prix de la baguette de pain par l’État. Quand il y a plus de trente ans, on a libéré le prix du pain, une majorité de responsables politiques et même d’économistes engagés ont crié à la catastrophe ultralibérale, parce que tout le monde pensait que les boulangers disparaitraient, mangés par la grande distribution. Il n’y a pas eu de catastrophe. Les boulangers, enfin libres de fixer leurs prix, ont trouvé là un peu d’oxygène et ils ont connu depuis une prospérité que personne n’avait imaginé. Plus étonnant encore, le prix du pain (libéré) n’a pas augmenté mais il s’est enrichi en qualité.
Bref, la concurrence est un des moteurs du progrès. Et dans le jeu de la concurrence, les consommateurs ont le rôle le plus important.
C’est le consommateur qui décide, et lui seul, de la vie et de la mort d’un produit, voire même d’une entreprise. Il achète ou il n’achète pas.
Alors beaucoup nous expliquent que le consommateur n’est pas véritablement libre, il subit la pression du marketing et de la publicité. C’est vrai. Mais rien de plus normal qu’un producteur fasse le maximum pour vendre son produit. Au bout du compte, le consommateur achète ou n’achète pas. Il est libre sauf si le produit en question est un produit de première nécessité en situation de monopole. Sur le marché de l’énergie par exemple, la marge de liberté du client est étroite. Sauf à se passer d’énergie, évidemment.
Dans le domaine des biens de grande consommation, la liberté est totale, la concurrence entre les marques est terrible. Alors pour quelles raisons le consommateur ne pourrait pas en profiter? Pour quelles raisons ne serait-il pas capable de comparer les prix, les conditionnements? Le consommateur peut choisir sa pâte à tartiner et si le Nutella lui parait trop cher, il peut changer de marque ou diminuer sa consommation. Ce qu’il fait d’ailleurs.
Sur tous les produits de consommation, le jeu existe. Et c’est bien ce qui gêne les producteurs et les distributeurs qui voudraient contrôler la partie. Et se partager la marge.
Le consommateur peut faire grève, il peut tuer un producteur d’un clic de souris. Sur l’automobile, la tech, les mobiles, la concurrence oblige les fournisseurs à d’adapter.
Dans l’habillement et la confection, on n’a jamais obligé les clients de Zara ou d’Uniqlo à acheter des produits faits dans les pays émergents. Le client le fait parce qu’il y trouve son intérêt.
Idem dans l’alimentaire, les possibilités sont très larges entre les grandes marques internationales, les produits bio, les produits locaux, de proximité, sur le marché du jeudi. Le choix est immense.
Il existe des pays dans le monde où cette liberté-là n’existe pas. Dans les pays très pauvres ou dans les dictatures.
En Corée du Nord, on ne peut pas acheter de la pâte à tartiner. Le droit à la paresse n’existe pas. Le droit au Nutella non plus.
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