Depuis 48 heures, les Russes qui le peuvent se ruent dans les avions pour quitter Moscou ou St Pétersbourg.

 

Tous les avions en partance vers des destinations étrangères encore ouvertes ont été pris d’assaut par les citoyens russes qui cherchent à fuir les conséquences des dernières décisions de Poutine, par peur de la réquisition et de la paralysie du pays.

Poutine va perdre la partie. Tout ce qu’il a dit hier le montre. Forcément. Mais il va perdre seul. La décision de rappeler 300 000 réservistes est très mal accueillie par tous ceux qui devraient revenir dans l’armée, ce qui va encore désorganiser l’économie parce que la plupart de ces réservistes occupent des postes d’encadrement dans le civil. Après les oligarques visés par les sanctions occidentales, c’est une grande partie de la classe moyenne qui est visée par Poutine lui-même.

Tous les Russes qui le peuvent cherchent donc à fuir la Russie pour échapper aux décisions de Vladimir Poutine dans son entêtement à poursuivre la guerre en Ukraine. Depuis 24 heures, et notamment depuis son dernier discours diffusé hier matin, la totalité des réservations de sièges ont été prises d’assaut au départ de Moscou ou de St Pétersbourg en direction de l’Arménie, de la Turquie ou de la Géorgie, qui sont les dernières liaisons aériennes possibles pour passer à l’étranger. A partir de l’Arménie, et surtout de la Turquie, les Russes peuvent se rendre à Dubaï, ou à Tel Aviv deux destinations très prisées par les ressortissants de Russie depuis le début de la guerre. Quant à ceux qui ont des passeports ou des visas, ils vont, à partir d’Israël ou d’Ankara, essayer de rejoindre leur famille réfugiée depuis le début de la guerre à Paris, Londres ou New-York.  Mais l’Europe ou l’Amérique du nord ne vont être ouvertes qu’à une infime minorité. Ceux-là ont réussi à protéger quelques biens, et de l’argent pour vivre à l’étranger. Le plus grand nombre de ceux qui se bousculent dans les aéroports russes vont aller en Israël, ou à Dubaï. Deux places qui dans le monde ont ouvert leurs portes depuis le début de la guerre.

Avant l’été, l’invasion militaire de l’Ukraine avait déjà provoqué une première vague d’expatriés.  Beaucoup d’oligarques d’abord et notamment ceux qui n’étaient pas trop visibles s’étaient réfugiés en Israël, à Dubaï, en Afrique du Sud, en Asie, là où il existe déjà une diaspora et surtout là où ils ont déjà mis des réserves financières à l’abri.

Mais à ce moment-là, le plus impressionnant avait été le départ des élites universitaires, des chercheurs, des intellectuels et des artistes qui ont trouvé en occident ou ailleurs des points de chute.

A cette époque, ces départs étaient motivés par des raisons politiques ou idéologiques, parce que ces élites se sont très vite opposées à la stratégie militaire de Poutine.

Depuis quelques jours, les expatriés sont des Russes qui craignent pour leur sécurité personnelle. Ils craignent d’être appelés à servir dans une guerre à laquelle ils ne comprennent rien, mais comme l’ordre de mobilisation partielle va toucher d’abord tous les hommes qui ont déjà servi dans l’armée et qui ont une expertise technologique ou managériale, il est évident que beaucoup de membres de la classe moyenne supérieure des cadres de la fonction publique, de la santé mais aussi de l’industrie vont être ciblés.

A priori, le ministre de la Défense a en projet de mobiliser 300 000 hommes, ce qui est considérable. Il va aussi aller chercher dans les campagnes des populations très défavorisées qui n’auront pas le choix de refuser d’autant qu’ils seront bien payés dit-on, sauf qu’ils vont être enrôlés comme fantassins et servir de chair à canon. Même traitement pour tous ceux qui sont en prison ou en hôpital psychiatrique et à qui on offre la liberté en contrepartie de leur engagement dans l’armée.

Mais à côté de ces militaires sortis de leur campagne, l’armée va avoir besoin d’encadrement, d’où la nécessité de rappeler des cadres qui sont aujourd’hui installés dans la vie civile. Toute cette classe va donc essayer d’échapper à l’enrôlement, mais une partie de la vie économique et sociale va se dérégler. Les villes comme Moscou ou St Pétersbourg vont perdre beaucoup de chauffeurs de bus, de personnel hospitalier, d’informaticiens ; de mécaniciens qui vont devoir partir former les jeunes militaires ou les encadrer sur le théâtre des opérations. Très peu de cadres vont accepter ce type de mission et abandonner femmes et enfants.

Pour beaucoup d’analystes qui connaissent bien la situation en Russie, Vladimir Poutine, qui a bénéficié du soutien populaire jusqu’à maintenant, risque de perdre cette adhésion. Humainement, la mobilisation partielle de ceux qui ont déjà servi dans l’armée va mal se passer d’autant qu’elle va aussi hypothéquer la situation économique en désorganisant les institutions civiles.