Geoffroy Roux de Bézieux : « Le Medef doit redonner le goût du risque aux Français »

Vous êtes candidat à la Présidence du Medef, pourquoi vous-êtes vous lancé dans la bataille ?
Je me suis déclaré parce que je crois que la crise que nous traversons n’est pas uniquement conjoncturelle. Il ne faut pas juste attendre que les choses aillent mieux. Nous sommes en période de mutation profonde et nous devons y faire face. Pour faire simple, en Europe et particulièrement en France, la mondialisation nous amène à être pris en étaux entre un continent nord américain qui innove et l’Asie qui fabrique. Et nous, nous croulons sous les dettes qui financent un état providence à bout de souffle. Je crois donc qu’il faut faire de la pédagogie et dire la vérité.
Quel est votre projet ?
Je veux porter l’idée que la rigueur n’est pas un objectif en soi. J’estime que le Medef doit redonner le goût du risque aux entreprises françaises et aux citoyens français. Cette société du risque, elle est pour l’instant difficile à appréhender mais c’est pourtant en prenant des risques, en innovant et parfois en se trompant, que l’on peu créer de la richesse et de l’emploi.
On vous a collé cette étiquette du candidat des PME et des start-up. Ça vous convient ?
J’ai envie de défendre tous les entrepreneurs. Contrairement à ce que l’on croit, il y a beaucoup plus en commun entre un patron du CAC 40 et le patron d’une start-up : les valeurs d’initiatives, de responsabilité, de liberté. Et puis n’oublions pas que les taxes augmentent, les normes changes sans cesse, les règlements nouveaux rendent le travail d’un dirigeant difficile. Aussi bien pour le chef d’une PME que pour le patron qui gère 10.000 salariés. Et puis, le Medef a toujours eu ce rôle de défense des entrepreneurs dans une société française qui est traditionnellement rétive à l’économie de marché et plutôt tourné vers l’État.
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« Je ne suis pour aucune amnistie, que ce soit un excès de vitesse ou que ce soit le comportement d’un patron ou d’un syndicaliste. »
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Vous avez déclaré lors de votre candidature votre souhait de refaire de la France un pays d’entrepreneur. Est-ce possible avec le contexte politique et économique actuel ?
D’un point de vue économique, c’est dans les moments de crise que l’on peut refaire un autre modèle. Donc oui c’est possible. Sur la question politique, on est évidement pas dans une situation optimale mais il y a des choses qui fonctionnent, des dossiers qui se montent, du capital-risque qui existe. Mais quand je dis cela, j’estime qu’être un entrepreneur, c’est plus large qu’un créateur d’entreprises. L’entrepreneur ne doit pas se réduire qu’au jargon de l’entreprise.
Le dossier qui met en colère le patronat, c’est l’amnistie sociale. Votre avis ?
C’est totalement scandaleux. Je ne suis pour aucune amnistie, que ce soit un excès de vitesse ou que ce soit le comportement d’un patron ou d’un syndicaliste. C’est une prime à la casse. Malheureusement on oublie que toute la journée, les patrons sont confrontés au code du Travail. C’‘est 2200 pages ! Et si on se trompe d’une ligne, il y a ce que l’on appel le délit d’entrave qui peut vous valoir une condamnation. Donc on ne peut pas dire, on met des règles absolument épouvantables au patron et de l’autre côté on amnistie les salariés. C’est véritablement une minorité d’extrême gauche, qui pour leurs raisons politiques, ont lancé ce débat. On voit bien leur jeu, car dans certaines entreprises ils ne s’intéressent même pas aux solutions de reprise ils s’opposent systématiquement. Ils sont là pour faire de la politique.
Quel est votre avis sur la politique économique actuelle ? Suivez-vous la position du Medef qui fait reproche au gouvernement d’étouffer les entreprises ?
Il y a en France, une longue tradition d’avoir un État très interventionniste. A droite comme à gauche. Si on fait le bilan depuis 6 mois, il y a des choses positives comme le CICE et l’accord sur la flexi-sécurité, s’il est respecté par le Parlement. Et puis, il y a un certain nombre d’éléments négatifs comme la fiscalité trop pénalisante pour les investisseurs, le relèvement du plafond de l’ISF et puis tous ces allers-retours sur la taxe à 75%. Tout cela ce sont de mauvais signaux pour l’entreprise. Je suis conscient que chacun doit faire des efforts, c’est pour cela que je n’ai pas de parti pris et que je suis prêt à dialoguer avec le gouvernement.
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« Je ne suis pas favorable à ce que l’on change les statuts pour permettre un troisième mandat à Laurence Parisot. »
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A propos justement de l’accord flexibilité-emploi, comment jugez-vous le travail accompli par Laurence Parisot ?
Je n’ai pas de jugement à avoir. Je ne juge pas les intentions mais les faits. L’accord est sur le point d’être respecté et le gouvernement de tenir ses promesses. Maintenant, il ne faut pas se dire que cet accord va tuer directement la peur de l’embauche. Il est historique dans la mesure où c’est la première fois que l’on arrive à ce type d’accord depuis quelques années mais comme tous les accords, il y a des éléments moins positifs pour les entreprises. C’est le cas par exemple de l’extension de la mutuelle à tous les salariés. Mais ce qu’il faut se dire, c’est que les Allemands sont en situation meilleures que nous et ont ce type de réforme depuis 10 ans.
Quel bilan tirez-vous des mandats de Laurence Parisot et que pensez-vous de sa nouvelle candidature ?
Laurence Parisot a exprimé sa position il y a une dizaine de jour. Moi, je ne suis pas favorable à ce que l’on change les statuts pour permettre un troisième mandat. Mais au Medef, nous sommes dans des processus totalement démocratiques. Tout cela sera discuté et voté. Si c’est voté je m’inclinerai. Pour ce qui est de son bilan, il y a eu des choses positives et d’autres qu’elle n’a pas pu empêcher. Le rôle du Medef c’est souvent de limiter les dégâts, malheureusement, suite à des initiatives de droite ou de gauche qui empêchent l’entreprise de se développer. Elle a contribué avec beaucoup de courage et de détermination à essayer de limiter un certain nombre de choses durant son mandat. Mais la France de 2005 ce n’est pas la France de 2013
D’après Challenges (N°335 du 7/03), vous êtes conseillé dans votre candidature par l’agence Havas. Cette dernière conseil aussi l’UIMM qui présente un candidat à la tête du Medef. Cela vous pose-t-il un problème ?
Je suis conseillé par personne ! Mon conseiller c’est moi et les patrons qui m’entourent. J’ai effectivement une agence de presse qui s’occupe des relations avec la presse. Il ne faut pas se tromper sur le rôle d’une agence de communication. Ce sont des gens qui sont là pour organiser les relations avec les médias et pas pour conseiller sur ce que l’on doit faire et pas faire, défendre et pas défendre. Et puis, à l’UIMM, il y a 10.000 adhérents et on ne fait pas de la politique. Avec Pierre Gattaz, qui est candidat, on s’appel régulièrement, on n’est pas en guerre. On partage beaucoup de choses en termes de valeur.
Si vous êtes élu, comment envisagez-vous votre relation avec le gouvernement ?
Il faut avoir une saine distance. Ni systématiquement complice, ni systématiquement critique. Ce sera du cas par cas en fonction des discutions et des mesures. Je suis là pour défendre les entrepreneurs et les entreprises.