La pénurie mondiale de semi-conducteurs peut nous mener à un scénario catastrophe.

Depuis trois ans maintenant, l’industrie mondiale est en risque de pénurie de semi-conducteurs. On découvre que ce secteur souffre de deux crises : une crise de l’offre et une crise de la demande. Le cumul de ces deux crises débouche sur des scénarios catastrophe.

Ça n’est pas un hasard qu’on ait surnommé les semi-conducteurs, les puces électroniques qui se faufilent partout. Au début de la révolution digitale, le géant mondial du secteur, l’Americain Intel, avait réussi à rendre sa propre puce comme indispensable dans la plupart des équipements. La marque et son slogan, le « Intel Inside » faisait vendre tout équipements électroniques. L’époque où le géant américain régnait en maitre absolu sur le marché est révolue.

Le secteur des semi-conducteurs est en crise et l’ampleur de cette crise qui pourrait faire basculer la planète dans la catastrophe économique et politique. Autant qu’une crise pétrolière ou gazière.

 Le sacro-saint semi-conducteur est un matériau isolant mais qui laisse passer un courant électrique. Ces matériaux font partie de la famille des composants électroniques et autres puces qui sont devenus indispensables pour actionner les dernières innovations industrielles, des voitures électriques et connectées, de la 5G dans les télécoms, dans l’intelligence artificielle ou encore les matériels modernes de la défense comme les drones de combat. Beaucoup plus importants et recherchés aujourd’hui que les armements traditionnels.

Le secteur des semi-conducteurs cumule aujourd’hui deux crises qui provoquent cette pénurie aux effets incroyables sur le reste du monde.   

Une crise d’offre d’abord. La crise du covid a paralysé le commerce international et a révélé au monde entier que la fabrication était concentrée dans quelques usines situées en Asie du Sud-est. A Taiwan principalement, le taiwanais TSMC assure 50% de la production mondiale suivi par le sud-coréen Samsung Electronics. (Environ 30% du marché mondial). Du jour au lendemain en 2020, les 4 ou 5 usines qui fournissent 80 % des besoins mondiaux se sont retrouvées à l’arrêt avec, en prime, l’impossibilité d’écouler les stocks faute de bateaux et d’avions bloqués, eux aussi, par la pandémie. Au cours de l’année 2020, cette fermeture des centres de fabrication n’a pas entraîné trop de dégâts puisque les industriels clients occidentaux tournaient eux aussi au ralenti. Quand tout a redémarré en occident, les industriels de l’automobile ou de la communication se sont retrouvés, otages, d’une poignée de fournisseurs plus ou moins bloqués. D’où l’arrêt des industries automobiles notamment. Les choses auraient pu rentrer dans l’ordre progressivement, sauf que ces difficultés d’offre ont révélé des crises latentes du côté de la demande.

La crise de la demande s’est donc ajoutée à la crise d’offre. On savait que la révolution digitale avec l’émergence dans la vie quotidienne de la connectivité notamment, et de l’intelligence artificielle allait gonfler la demande, mais la Covid a encore accéléré l’évolution. Tous les secteurs industriels se sont mis à intégrer des puces dans leurs produits qui sont devenus de plus en plus indispensables et ont passé commande à la poignée de fournisseurs asiatiques. D’où la pénurie incroyable actuelle qui provoque la mise à l’arrêt d’une partie des usines automobiles, mais hypothèque aussi le développement des mobiles de communication.

Cette pénurie n’entraine pas seulement une hausse des prix, mais accroit les tensions politiques. Les pays occidentaux ont bien compris qu’il fallait qu’ils affranchissent de leurs fournisseurs asiatiques et qu’ils trouvent des alternatives.

 Mais la mise en place des centres de production, en Europe notamment, va demander beaucoup de temps et beaucoup d’argent. Le projet STMicroelectronics où l’Europe doit investir plus de 10 Milliards d’euros ne sera pas opérationnel avant 5 ou 10 ans.

Entre la pénurie de batteries et le manque de micro-processeurs, c’est toute la mutation écologique très gros consommateur, qui sera en difficulté.

Mais la crise n’aura pas que des dimensions économiques. Elle a forcément un impact politique. D’abord, parce qu’une partie des systèmes de défense sont liés à la nécessité d’équipements électroniques. Le micro- processeur est au cœur des système d’armes modernes.  

Ensuite, parce que les pays leaders en fabrication comme Taiwan vont devenir des pays otages (de la Chine) et enjeux des grandes puissances internationales. Si la Chine convoite Taïwan, ça n’est pas seulement pour récupérer une terre qui aurait appartenu à son histoire, c’est aussi pour mettre la main sur ses équipements industriels.