La voiture électrique ou comment fracasser une industrie pour des raisons politiques.

 

A l’ouverture du salon de l’automobile, Emmanuel Macron a confirmé le projet d’accélérer le développement de la voiture électrique. C’est un choix purement politique qui va provoquer des conséquences économiques et sociales qu’on n’ose pas imaginer.

C’est un choix purement politique que de chercher à imposer la voiture électrique parce que très honnêtement, les clients n’en rêvent pas la nuit.

La technologie ne permet pas d’avoir, avec la voiture électrique, les mêmes services que la voiture thermique. Elle coute très cher (30 % de plus) le choix n’est pas très large, l’autonomie n’est pas suffisante pour garantir un voyage de plus de 200 KLM, les points de recharges sont rares, les conditions de recharge sont trop longues etc. Tout cela fait que les clients ne se précipitent pas sur la voiture électrique et les constructeurs trainent des pieds.

Il y a quelques années, les services de communication de Renault avaient commandité à Luc Besson un film dont l’acteur principal était une des premières voitures électriques : la Zoé. Le scénario était d’un romantisme rare, le tournage était campagnard.  L’histoire d’un jeune homme qui part en voyage pour soigner un chagrin d’amour. Mais qui tombe en panne à 100 KLM de Paris en pleine campagne. Il est récupéré, lui et sa voiture, par un fermier qui va lui offrir le gite en attendant que la voiture se recharge. Bien sûr, la fille du fermier n’a pas résisté au charme du jeune homme et tout ça, grâce à la technologie. Quelle image et quel fiasco. Renault a évidemment empêché la sortie du film.  Sauf que le film existe encore et que personne ne s’en vante : ni le producteur, ni le réalisateur, ni les acteurs très connus. Pour le voir :

https://www.renaultgroup.com/news-onair/actualites/renault-zoe-a-laffiche-du-film-un-prince-presque-charmant-gagnez-vos-places/

A l’ouverture du salon de l’automobile, Emmanuel Macron a confirmé son projet d’accompagner massivement l’industrie automobile, les constructeurs, les sous-traitants et tous les services associés pour développer la voiture électrique.

En 2017, les ventes de voitures électriques représentaient 1% du marché, aujourd’hui, les voitures électriques représentent 13% des ventes annuelles. Le président de la République projette de parvenir au seuil de 30 % à la fin de son quinquennat. C’est la raison pour laquelle il va encore booster les aides et passer le bonus écologique de 6000 à 7000 euros pour les ménages les plus modestes.

Parallèlement, il a annoncé une extension du bouclier tarifaire aux bornes électriques à partir de janvier 2023 avec un objectif de 40 000 bornes de raccordement par mois en 2030. Le marché devrait aussi pouvoir offrir un leasing long terme de 100 euros par mois pour disposer d’une voiture électrique dans le courant de l’année 2023.  Le président de la République espère  que le marché français sera de 1 million de ventes par an à la fin de son mandat, contre 200 000 actuellement. Le projet parait très ambitieux.

Personne ne sait encore aujourd’hui si ces promotions permettront de dégeler un marché qui n’est pas euphorique. Cette évolution sera sans doute complétée par des dispositions punitives pour dissuader l’usage des voitures thermiques qui devraient en théorie être interdites de circuler à partir de 2035. Le projet est considérablement ambitieux et pour beaucoup très utopique.

Ce projet est éminemment politique et même idéologique. Il s’agit, soyons clair, de répondre à la pression des groupes écologiques qui ont pris la voiture individuelle dans leur cible comme outil et comme symbole de la lutte pour la réduction des émissions de gaz carbonique Alors que l’automobile est loin d’être la première source des gaz à effet de serre mais qu’elle est sans doute le moyen le plus spectaculaire, le plus voyant, et c’est aussi le plus populaire,  le plus utile.

Du coup, la majorité des experts savent qu’en mettant l’accent sur une transition très rapide des moyens de transport individuel vers l’électrique, nous allons au-devant de bouleversements que nous ne saurons pas gérer.

Cette transition vers l’électrique de tout le système de transport est impossible à réaliser aussi rapidement.

D’abord, première raison, parce que la technologie ne permet pas d’obtenir des performances et une autonomie équivalente aux performances actuelles. Les produits sont très différents, il faudra donc imaginer des modes d’utilisation différents, ce qui n’est pas gagné et prendra beaucoup de temps. D’autant que la mobilité électrique sera plus chère que la mobilité thermique

Ensuite, parce que dans l’état actuel de la capacité de production électrique, un pays comme la France ne pourra pas répondre à la demande. Il faut faire repartir des centrales nucléaires et surtout, lancer le programme EPR. Or, le choix politique du tout électrique ne parait pas être accompagné par le choix de reconstruire une industrie uniquement basé sur le nucléaire.

Enfin, tout le modèle économique devra évoluer. Actuellement, la filière automobile, entre les constructeurs, les sous-traitants, les concessionnaires, les mécaniciens, les distributeurs, l’industrie pétrolière, cette filière représente, avec le bâtiment et le tourisme, les plus gros employeurs.

Tous les constructeurs automobile ont d’ailleurs tiré la sonnette d’alarme sur les risques sociaux que le tout électrique va faire courir au pays. Et ce n’est pas le choix de rapatrier les constructions industrielles en Europe qui va résoudre le problème.

En bref, une voiture électrique utilise quatre fois moins d’emplois qu’une voiture à essence ou une voiture diesel. Pour un cout au client 30 % plus cher.

Il va donc falloir dans la période transitoire, sponsoriser l’achat de la voiture et traiter le chômage lié à la mutation.

Dans l’histoire économique, les grandes mutations se sont étalées sur un siècle. La machine à vapeur, les moteurs thermiques. L’automobile a mis plus de 50 ans à devenir un produit de masse, comme le téléphone ou la télévision. Le micro-ordinateur a mis 30 ans, mais la digitalisation (le mariage de l'ordinateur et de l’internet), moins de 20 ans. Aujourd’hui, on voudrait assurer la transition électrique de l’automobile en 10 ans.  C’est très rapide et donc dangereux, surtout que cette mutation correspond à un mouvement idéologique et politique.