Les candidats à la présidentielle vont tous proposer des impôts nouveaux sur les successions alors que le mieux serait de les supprimer.

La réforme de l’impôt sur les successions ne sert à rien d’autres qu’à répondre à des objectifs politiques. Les candidats à la présidentielle ont tous leur idée sur l’imposition des successions, mais l’impact économique est nul. 

‘impôt sur les successions est 100% politique et 0% économique. Emmanuel Macron avait très vite enterré le projet de réformes qu’il avait annoncé en 2017. Personne ne sait s’il en ressortira une nouvelle mouture pendant la prochaine campagne électorale, mais c’est peu probable. Il a beaucoup d’autres dossiers à défendre.

Tous les candidats à la présidentielle ont chacun leur idée sur l’impact électoral d’une réforme de l’impôt sur les successions, mais aucun n’a véritablement un dossier de l’impact économique d’une modification de l’assiette successorale ou du taux d’imposition.

Valérie Pécresse voudrait faciliter les donations et alléger la fiscalité sur les successions. L’extrême droite de Marine Le Pen veut aussi réduire la pression de l’impôt sur les successions. Éric Zemmour réfléchit à augmenter le seuil à partir duquel on pourrait déclencher l’imposition (200 ou 300 000 euros plutôt que les 100 000 actuels).

A gauche, c’est presque plus ambigu, on reconnaît que taxer l’héritage de la famille est mal vécu mais c’est très souvent plus un ressenti qu’une réalité. Moins de 20% des successions sont soumise à la taxation. La moyenne des successions en France est inférieure à 70 000 euros. La fortune médiane également. Quand on sait que la première tranche de 100 000 euros par héritier est déjà exonérée, il reste assez peu de contribuables assujettis. Mais ceux qui restent sont importants donc ils nourrissent le ressenti et même les fantasmes.

Cette situation a conduit Jean-Luc Mélenchon à définir un héritage maximum pour les grandes fortunes (qui seraient alors plafonnées à 12 millions d’euros...).

Du côté des écologistes, Yannick Jadot a imaginé de créer un ISF climat calculé sur les héritages, mais il faut encore qu’il précise son fonctionnement parce que, jusqu’alors, peu d’experts ont compris comment ça pouvait fonctionner.

Le dernier rapport publié par le Conseil d’analyse économique (CAE) préconise un renforcement des droits de succession, ce qui pourrait relancer le débat dans la classe politique mais qui ne donne guère de pistes pour éviter de tourner en rond.

Ce débat, qui porte aussi bien sur l’ISF que sur les droits de successions, a très peu de chance ou de risque d’aboutir. Pour une raison que personne ne veut reconnaître.  

Les projets d’impôts sur les successions ou sur le capital n’ont qu’un impact politique et cet impact est très diversifié.

Globalement, les partis et les responsables de gauche sont plus souvent favorables à l’imposition des successions que les partis situent à droite. Cela dit, les uns comme les autres savent que les taxes sur l’héritage sont très impopulaires dans la majorité des familles, y compris dans les familles qui ne sont pas riches au point de laisser un héritage. Bref, on est intellectuellement favorable à la taxation pour des raisons morales ou éthiques, mais dans les faits, les mêmes vont défendre un allègement des taux.

Cette situation vient du fait que l’écrasante majorité des Français ne sont pas assujettis à l’ISF, alors qu’ils ont un petit héritage à léguer à leurs enfants et ils y tiennent comme à la prunelle de leurs yeux, même si les héritages en question ne sont absolument pas taxables.

Les droits de succession, et plus généralement la taxation des héritages, est donc à manier avec prudence. Sa seule fonction est politique. L’objectif est de plaire ou de ne pas déplaire à un segment d’électeurs.

Au niveau strictement économique, les droits de succession ont peu d’intérêt. Le produit fiscal est ridiculement bas. Pour les grosses successions, il ne réduit pas les inégalités. Les vertus moralisatrices, qui lui sont très souvent prêtées, sont purement fortuites.

Les droits de succession ont si peu d‘intérêt que, pour des raisons d’efficacité, beaucoup d’économistes préconisent leur suppression pure et simple. Pascal Salin, par exemple, a mille fois expliqué le caractère toxique de l’impôt sur la succession. L’accumulation du capital pour un individu correspond à l’exercice de sa liberté individuelle. Il préfère épargner que consommer, il préfère constituer un capital qu’il lèguera à ses enfants ou à des tiers de son choix. Là encore, c’est l’expression de son choix.

La taxation du capital ou de la succession revient à hypothéquer ce choix et à la dissuader de continuer de travailler. La taxation de l’héritage incite à la consommation plutôt qu‘à l’investissement. Pourquoi épargner et investir si l’Etat prend tout ?

Donc, mieux vaut consommer ou alors s’expatrier vers des climats fiscaux plus cléments. Ce que font un certain nombre de contribuables aisés dès qu‘une menace plane sur les dossiers fiscaux.

Quant aux questions morales que posent l’héritage en favorisant la rente plutôt que le travail, elles sont aussi assez théoriques.

D’abord, parce que l’inégalité que crée l’héritage ne dure que si l’héritage est bien géré, sinon ça se termine mal.

Par ailleurs, et dans la plupart des cas, l’héritage ne porte que sur la propriété des actifs lesquels sont réinvestis dans l’économie et continuent à créer de la valeur utile à la collectivité, à condition d’être correctement gérés.

Le capitaine d’industrie n’a aucun mal à léguer ses affaires à ses héritiers. Il a souvent beaucoup plus de difficultés à trouver les managers compétents qui pourront reprendre son affaire.

Ce qui peut paraître immoral, ça n’est pas l’héritage, ce sont les héritiers incapables d’entretenir la fortune. Ce qui est immoral et toxique pour l’économie, ce sont les héritiers qui se croient compétents et qui n’ont pas l’intelligence de confier leurs affaires à des experts par peur d’être dépossédés. La morale oui, encore qu’on n’est plus dans le registre de la morale, on est dans la recherche des ressorts de l’efficacité.