Les communes se vengent de la suppression de la taxe d’habitation avec la taxe foncière qui explose partout.

La majorité des Français n‘ont pas digéré la hausse de la taxe foncière qu’ils ont dû payer ces dernières semaines. Parce que les communes qui ont perdu le produit de la taxe d’habitation essaient de se rattraper comme elles peuvent.

La suppression de la taxe d’habitation décidée par Emmanuel Macron au début de son quinquennat n’a pas fait que des heureux. Les communes et les collectivités locales ont perdu une grande partie de leurs recettes. Cette perte n’ayant été compensée que partiellement par l’Etat, elles ont été obligées d’augmenter les taxes foncières et d’autres taxes locales. Du coup, la digestion est difficile. Le montant de taxe foncière qu’il fallait payer au plus tard le 15 octobre est resté en travers de la gorge.
Les procédures digitales de mise en ligne des avis de paiement ont beau avoir un pouvoir anesthésiant sur le contribuable qui ne regarde des feuilles d’impôt que d’un œil, il n‘empêche que, quand il a fallu payer les soldes, ça passe mal.
La suppression de la taxe d’habitation apparaissait comme une bonne nouvelle pour le plus grand nombre, mais comme elle a été mal préparée, elle se révèle désormais toxique provoquant aujourd’hui des effets secondaires en cascade qui sont particulièrement pervers.
1er point et c’est vrai : les Français auront économisé 39 milliards d’euros en 5 ans avec la suppression de la taxe d’habitation. La taxe d’habitation est payée par tous les Français sur le logement qu’ils habitent à titre de résidence principale ou secondaire. C’est une taxe qui va principalement dans les caisses des collectivités locales (notamment les communes). En 2021, la taxe d’habitation a été complètement supprimée pour tous les résidents dont le revenu fiscal de référence de 2020 était inférieur à 27 761 € pour la première part de quotient familial et de 50 000 euros pour plus de 2 enfants. Ce qui touche près de 80 % des Français. D’où le caractère politiquement spectaculaire de la réforme.
2e point, revers de la médaille, la suppression de la taxe d’habitation a privé les communes de beaucoup de leurs recettes fiscales. La taxe d'habitation est encaissée par la commune et par le département dans lesquels le bien immobilier se situe. Elle permet de financer les différents services mis en place par la commune dans le but de rendre service aux habitants, et d'améliorer la qualité des équipements collectifs. Privées de recettes locales, les communes devaient recevoir une compensation de la part de l’Etat, mais ces allocations ne sont pas à la hauteur.
3e point, par compensation, les communes ont essayé de se rattraper sur les taxes sur lesquelles elles gardent la main : les taxes foncières et diverses autre taxes locales accumulées au cours des années. Ces taxes foncières s'appliquent à tous les biens immobiliers situés en France et chaque propriétaire les paie une fois par an. La taxe foncière concerne tout propriétaire d'un bien immobilier (logement, local d'activité, terrain). La taxe foncière est souvent accompagnée de taxes assimilées aux impôts locaux. C'est notamment le cas de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères qui porte sur tous les biens assujettis à la taxe foncière.
4e point : ces taxes foncières n‘ont pas cessé d’augmenter. L’Union nationale des propriétaires immobiliers indique que la taxe foncière a augmenté de 27,9 % entre 2010 et 2020. Au cours des 5 dernières années, la hausse a été de 11,4%. Et la tendance se poursuit notamment cette année avec la suppression effective de la taxe d’habitation. Alors, la hausse s’explique par la décision des collectivités locales de relever les taux, mais aussi par la revalorisation des valeurs immobilières, compte tenu de l’évolution des prix de l’immobilier.
Du coup, les hausses sont très spectaculaires dans les grandes villes, Nantes, Angers, Amiens, Grenoble, Paris.
5e point, ces hausses de taxes foncières noircissent un peu le tableau que dresse le gouvernement d’une France qui aurait bénéficié d’allègement fiscaux. Globalement, les hausses ne compensent pas les baisses, mais on n’en est pas loin. Ce qui change, c’est la géographie et la sociologie de la fiscalité. Des retraités plutôt aisés vivant à Nice vont économiser une partie de la taxe d’habitation, mais, parce qu’ils sont propriétaires, ils se retrouvent avec une taxe foncière majorée.
Des retraites moins aisés (27 000 euros par exemple) oublient complètement la taxe d’habitation mais paieront la taxe foncière. S’ils habitent Clermont-Ferrand, ils ne paieront pas beaucoup plus, s’ils habitent Amiens, la note sera salée (+20%).
Conclusion : faire le bilan de ceux qui gagnent et de ceux qui perdent va être très compliquée à établir. Ce qui va évidemment alimenter les débats électoraux, mais pas éclairer pour autant l’avenir et le traitement du contribuable. En général, les gouvernants ne touchent à la fiscalité qu‘à leur dépends. A court terme, ça peut marcher. A plus long terme, l’effet boomerang leur revient de plein fouet.
Le cas des impôts locaux est flagrant. En supprimant la taxe d’habitation, l’Etat a mis les communes en difficultés, qui essaient de se rattraper par la taxe foncière. Le contribuable aurait préféré qu’on mette à plat toutes les dépenses publiques. Mais en France, on ne touche pas aux dépenses publiques.