Retraite : à bloquer la réforme, les syndicats et la gauche vont dévier les Français vers des régimes par capitalisation

C’est une évidence. Si la retraite par répartition ne parvient pas à sécuriser son équilibre, les Français se tourneront vers des systèmes complémentaires par capitalisation. Que les syndicats le veuillent ou non. Que le gouvernement intègre cet outil à ses réformes ou pas.
Le politiquement correct, c'est la répartition
Une retraite par capitalisation ne fera pas de miracle… Mais elle est capable d’apporter des compléments de ressources à des pensions de retraite hypothéquées par les évolutions démographiques, comme c’est le cas actuellement.
Actuellement, l’idée de la capitalisation est complètement taboue dans le débat sur les retraites. Personne n’ose ouvrir cette voie de réforme qui a fait ses preuves dans la plupart des pays développés. Aux Etats-Unis comme en Allemagne.
Et quand les voix s’élèvent de temps en temps comme celle de David Lisnard, le maire de Cannes, ou de l’économiste Jacques Garello pour expliquer que peut-être, il y a là un début de solution, elles sont très rapidement couvertes par le brouhaha des manifestations.
En fait, le politiquement correct, en France, protège le principe de la retraite par répartition parce que la répartition est au cœur de notre modèle social dominé par le paritarisme syndical. C'est dans l’ADN de la gouvernance française. En théorie, les syndicats ont le pouvoir de gérer les régimes.
La retraite par capitalisation ouvre la voie à l’individualisation des retraites, parce que chaque retraité peut prendre ses responsabilités. Culturellement, c’est très diffèrent.
La retraite par répartition répond à une logique assurancielle. D’un côté, nous avons des salariés qui cotisent pendant leur vie active pour s’acheter la promesse d’une pension de retraite quand ils arrêteront de travailler. Comme dans une société d’assurance, c’est le montant des primes perçues qui financent les pensions. Il faut donc que le système soit à l’équilibre pour que les promesses soient tenues. Tout dépend du montant des cotisations, du montant des pensions, et par conséquent du nombre des actifs comparés aux inactifs. Pendant des années, on a réussi à maintenir l’équilibre en adaptant le montant des cotisations et des pensions. Quand les actifs n’ont pas été assez nombreux pour assurer les pensions de retraites, et bien les régimes par répartition ont commencé à emprunter. En fait, les systèmes de retraites par répartition ont réinventé le principe de Ponzi avec la bénédiction de l’État et du contribuable. Cette situation est évidemment intenable à terme, d’où la nécessité de trouver des recettes supplémentaires et allongeant la durée de cotisations ou en décalant l’âge légal de repart à la retraite. Ce qui ne passe pas politiquement.
Moins d'Etat dans la capitalisation
La retraite par capitalisation répond à une logique de placement. Les salariés sont invités à mettre de l’épargne qui sera investie dans l’économie et les produits de ces placements serviront de compléments de retraites le jour venu. Alors cette épargne peut être gérée individuellement, si les gens sont riches, ou collectivement dans le cadre des fonds de pension. Cette épargne sert à alimenter les fonds de retraite mais elle sert aussi à financer l’économie puisqu’elle est investie dans les entreprises.
Cette formule de capitalisation n’a rien de miraculeux. Son efficacité dépend de la situation économique et boursière. Plus la croissance est forte, plus il y aura de travail, plus l’épargne investie sera valorisée et par conséquent, plus les retraites seront sécurisées. Dans le régime par répartition, tout dépend également de la situation économique. Plus il y a de croissance et d’actifs, mieux ça marche pour les inactifs. D’un côté comme de l’autre, la clef de la performance est la quantité de travail. Que cette quantité passe par la durée de cotisations, l’âge de départ ou la productivité.
Les différences sont ailleurs.
Dans la répartition, l’argent des cotisations retraite payées par les actifs finance immédiatement la pension des inactifs. Et si l’argent n’est pas suffisant, on s’endette et on tombe dans le schéma de Ponzi. C’est ce risque-là que le projet actuel de réforme veut réduire. Le tout est géré par l’administration de la sphère sociale dont les syndicats.
Dans la capitalisation, l’argent est géré sur les marchés financiers et notamment par les professionnels du placement dont la vocation est de sécuriser le système. Et d’optimiser leur performance. Alors des crises peuvent provoquer des problèmes graves, mais c’est rarissime. Il existe désormais des filets de sécurité assez efficients.
La grande différence est ailleurs. Dans la capitalisation, le pouvoir de gérer est très individualisé et le plus souvent privatisé. Même si les entreprises et les organisations sociales ont leur mot à dire puisque l’entreprise peut abonder les fonds, ils peuvent y associer des fonds d’intéressement ou de participation.
La logique est donc très différente. Le rôle de l'État est moindre dans la capitalisation, même si l'État peut intervenir par des incitations fiscales.
PRD, PER et autres Prefon
Les systèmes par capitalisation ne feront pas de miracle, mais bien gérés, ils contribuent à sécuriser les salariés, tout en préservant sa liberté. Liberté de choisir le montant investi, liberté de choisir la date de départ en retraite, liberté de prendre ou pas sa retraite et à quelles conditions. Les systèmes par capitalisation ne peuvent pas remplacer les systèmes par réparation mais ils peuvent offrir une part complémentaire qui pourrait être utile pour éviter la faillite du système. La capitalisation n’a donc rien de miraculeux. Mais elle n’est pas, pour autant, diabolique.
Les plans d’épargne retraites (les PRD – qui avaient été inities par Alain Madelin puis presque généralisés par Bruno Le Maire en PER), qui sont distribués par le système bancaire ont beaucoup de succès actuellement.
Mieux, le premier exemple de produit par capitalisation mais aussi le plus ancien est la Prefon. Il date d’il y a plus d’un demi-siècle. Il est réservé aux fonctionnaires. Les syndicats dont la CGT le cogèrent. Les fonctionnaires ne s’en vantent pas, mais ils souscrivent massivement. Comme quoi, le bon sens…
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