Rothschild & Co : l’alliance entre semblables Les grandes familles du capitalisme français pour renforcer la souveraineté de la banque

Trois dynasties au service d’une des plus grandes du monde de la finance. Dans un tour de table préparé depuis de plusieurs mois, ce sont surtout des actionnaires français qui viennent soutenir la famille de David de Rothschild dans sa volonté de retirer la banque de la cote.

 

Par Aude Kersulec

Le réseau des Rothschild : les grandes familles

Les propriétaires de Chanel, les frères Wertheimer, vont investir via leur family office new-yorkais, tandis que Peugeot Invest, société d’investissement, officiera pour le compte de la famille éponyme. « Cette opération s’inscrit pleinement dans la stratégie de Peugeot Invest qui consiste à investir dans des leaders de leur secteur, aux côtés d’entrepreneurs et de familles, et à participer à leur gouvernance » explique Robert Peugeot. Lui ou l’un de ses proches devrait d’ailleurs occuper un siège au conseil de surveillance de la banque. La famille Dassault, qui était déjà actionnaire, renforce sa participation ainsi que l’entrepreneur italien Giammaria Giuliani.

Ces alliances ne sont pas surprenantes et les relations entre chaque entreprise et la banque Rothschild ne datent pas d’hier. "Ces familles ont toutes des relations de confiance avec les Rothschild  pour différentes raisons » rappelle François Pérol, co-président du comité exécutif. Qu’elles soient historiques - les Rothschild ont été confrontés au nazisme, comme les frères Wertheimer, partis en exil aux Etats-Unis ou la famille Bloch-Dassault, déportée à Buchenwald – ou commerciales. Bien plus récemment, la banque a conseillé PSA lors de sa fusion avec Fiat Chrysler.

Après l’OPA réalisée, chacune de ces familles représenteront environ 5% du capital. Les associés-gérants de la banque verront eux leur part au capital passer de 5% jusqu’à un maximum de 10%. Un pacte d’actionnaires devrait prévoir une période d’incessibilité des titres pour une durée de huit ans, sans promesse d’achat ou de vente à l’issue de cette période.

Sortie de bourse et accélération sur le non-coté

Avec un titre qui paraissait sous-valorisé et trop peu liquide pour intéresser les investisseurs institutionnels, la banque ne faisait de toute façon pas appel aux marchés financiers pour réaliser ses opérations et son titre bien est trop peu. « Il était clair que nous avions atteint la limite et le plein potentiel d’être coté en bourse » confesse Alexandre de Rothschild. « Rothschild & Co avait même du mal à justifier sa présence en bourse » raconte un spécialiste du secteur. Pour une banque habitée par le secret des affaires, la bourse, qui demande des justifications - au moins semestrielles - de l’évolution des chiffres et perspectives financières, n’est pas le mode de financement adapté. Surtout quand on veut se renforcer dans des activités qui demandent une vision de long terme.

Pour les spécialistes, ce retrait de la bourse, qui interviendrait d’ici à la fin du 1er semestre, traduit une volonté de la banque d’aller plus loin dans ses investissements dans le non-coté, d’où est issu le binôme de dirigeants actuels, Alexandre de Rothschild et Marc-Olivier Laurent, qui vient tout juste de remplacer David de Rothschild à la présidence du conseil de surveillance.

« La durée de détention des participations non cotées, en moyenne de 6 à 8 ans, doit amener à apprécier la performance sur le long terme, ce qui peut convenir à des actionnaires familiaux qui ont les mêmes besoins » explique un analyste.

Le merchant banking est également bien plus profitable que le conseil en fusions acquisitions, avec un meilleur retour aux actionnaires, ce qui expliquerait que Rothschild n’ait pas eu de difficulté à trouver des partenaires.

En affaires, le dicton « qui se ressemble s’assemble » a encore du sens.

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